Il y a quelques années, j’étais allée en Palestine, une grande et belle expérience. J’en avait fait un spectacle « Vadrouille en Palestine ». Aujourd’hui je vous fait part des textes issu de ce spectacle, avec mon expérience lorsque je suis allée sur l’esplanade des mosquées, en plus développé, et dans un style vulgariser.
première visite
A Jérusalem, se trouve la mosquée d’Al-Aqsa… Qui est sous occupation ! On parle là du troisième lieu saint de l’Islam, pas de la mosquée de Barbès entourée de vendeurs de maïs, de prostitués, et de dealers de crack.
J’ai voulu y aller mais de suite on m’a dit : « Attention Jacques, ils contrôlent à l’entrée pour filtrer les musulmans des non-musulmans ». Je me dis ok pas problème je vais lui réciter la shahada. C’est l’attestation de foi, en douze secondes en attestant qu’il y a un Dieu unique et que Muhammad est son messager, t’es musulman, quinze secondes pour les plus sceptiques. Pas plus rapide sur Terre pour changer de vie.
Et quand je lui récite la shahada, yalla je suis musulman salam aleykoum, monsieur me dit « no ». Je ne comprends pas et je l’enchaîne : « Why no, you want a sourate, yess yess…Why sourate, why just shahada muslim, just shahada muslim, it’s not islam youuu ». Telle a été ma réaction entre énervement, frustration de ne pas être pris au sérieux dans mon attestation.
Bon ils ont fini par me laisser rentrer. Ceci-dit il était normal qu’Allah m’envoie une petite épreuve pour tester ma foi en une religion que j’ai adoptée assez récemment, surtout en ce vendredi, jour de prière. Mais ceux qui garde l’entrée, ce sont des policiers israéliens qui sont des Druzes, j’étais à deux coudées de me faire virer par une secte d’une secte de l’Islam, c’est comme si des témoins de Jehova gardait l’entrée du Vatican.
Me voici enfin sur l’esplanade des mosquées, où se trouve la mosquée d’Alqsa, la mosquée Dôme of the rock, et divers monuments, des oeuvres d’arts représentant des millénaires d’histoires.
J’ai pu ressentir les tensions qui règnent dans une ville censée symboliser la paix. Mais malgré tout j’apprécie cette atmosphère de bien-être. Mon corps et mon âme vibrent, j’ai une sensation unique dans cette cité où tous les prophètes de Dieu monothéiste sont passés, où nombre de Rois, d’Empereurs, Sultans, conquérants, combattants, pèlerins ont contribué à écrire l’histoire de Jérusalem. Je fais abstractions des tensions politico-religieuses sous fond de revendications extravagantes, comme le fait d’être capitale de deux états ou qu’elle soit capitale éternelle est indivisible d’un seul état/peuple/religion d’une ville conquise 44 fois…
J’apprécie égoïstement en compagnie des autres touristes occidentaux et du Golfe que je ne verrai d’ailleurs qu’ici, de la chance qui m’est donnée d’être là, ne sachant quand une prochaine occasion se représentera.
J’ai pu enfin être le témoin visuel des fouilles entreprises sous la mosquée d’Al-Aqsa, objet de toutes les supputations. Officiellement, ils font des recherches dans les vestiges de l’ancienne cité de Salomon et de ses trésors enfouis sous la vieille ville. Ils cherchent du vieux dans du vieux. Le judaïsme c’est de l’archéologie. Officieusement, ils veulent affaiblir les fondations de la mosquée d’Al-Asqa afin qu’elle s’écroule pour reconstruire le Temple de Salomon, et récupérer la sainteté du lieu pour leur propre dogme, conformément à leur prophétie.
Ils galèrent franchement, passé par en dessous, taper les fondations au burin pour réaliser quelques fissures qui peuvent être rebouché, tout ça afin de voir jusqu’où va la patience des musulmans. Comme si on épilait quelqu’un en lui arrachant poil par poil. Pourquoi ils ne la bombarde pas, elle et sa voisine sur le Mont du Temple, le Dôme du Rocher, rasées avec deux frappes chirurgicales comme ils savent si bien le faire à Gaza. On sera de suite dans le vif du sujet : c’est soit leur temple, soit une guerre mondiale. Perte de temps pour arriver au même résultat.
Je n’ai malheureusement pas pu aller en dessous, je n’ai rien à rajouter.
Les galères de pouvoir rentrer à Al-Aqsa étaient oublié dès que je retrouvais mes frères de Bethlehem. Dans le camp de réfugié, en tant qu’invité, mes frères avaient la gentillesse de me laisser au premier rang à chaque fois que je priais en leur compagnie à la mosquée. Heureux qu’on vienne les voir, mais ils étaient par-dessus-tout, heureux que je partage avec eux la même religion.
Le sens de la oumma, la communauté des croyants prends tout son sens dès que nous voyageons pour voir nos frères à l’étranger. Notre foi nous unis au-delà de la barrière de la langue, des différences culturelles, nous nous comprenons car ce qui nous fait vivre en notre for intérieur est la même chose.
Deuxième visite
Cette fois-ci, j’y retourne pour la salât joumou’aa, je sais que je vais subir un interrogatoire, mais je commence à être rôdé à l’exercice et du mode de fonctionnement de ces différents territoires que j’arpente lors de nos visites.
Après la shahada habituelle, voici que le gardien me questionne : « how many ra’kat for dhor ? »four », le répondis-je. Et ensuite il me demande : « and for joumou’a ? ». Ben two il m’a pris pour hmar ou quoi ? Mais en tout quoi cela nous a bien fait rire que même l’agent en rigolait. L’humour sous occupation…
Troisième et dernière visite
Mais avant de partir définitivement, je veux retourner à Jérusalem, et vibrer à nouveau, une dernière fois. J’y vais en compagnie d’un membre de la famille d’un des guides. Un dernier contrôle au check-point à voies multiples, c’est une sorte de péage entre Bethléem et Jérusalem. Le treillis prends de l’avance sur le shabbat car il ne fouille même pas mon bagage, je pourrais avoir de la dynamite à l’intérieur, ce n’est pas sérieux ça !
Mon conducteur peut aller à Jérusalem car il a carte d’identité multizone mais ses cousins de Bethléem ne peuvent aller à deux kilomètres de chez eux. Je me suis plains de la difficulté de circulation alors que c’est moi finalement qui peut le mieux me déplacer ici, un autre paradoxe de l’occupation. J’ai honte car ils méritent bien plus que moi d’aller prier à Jérusalem, eux, qui depuis l’enfance rêve de pouvoir y accéder, de sentir le sol chaud des pierres de la vieille ville. Je me rends compte que mon soutien est symbolique, comment puis-je être heureux d’aller à Jérusalem dans ces conditions ?
Je retourne une dernière fois sur l’Esplanade des mosquées et miracle aucun contrôle, rien, mon bronzage, ma barbe et mes cheveux crépus qui ont poussé font que je ressemble un palestinien, je ne suis pas en train de regarder d’un air béat les bâtisses de la ville sainte, j’en ai que faire, ici c’est chez moi, je marche d’un pas naturel décidé, je sais où je vais sans réfléchir c’est inné. Je suis palestinien, je résiste et j’existe et j’ai un but dans ma vie et quand les aléas me tireront vers l’ennui je sais que j’ai toujours un objectif auquel me raccrocher. Que la mort qui peut surgir à chaque seconde fera de moi un martyr à la place d’un martyr. Oui ma vie change al hamdulillah !
Mais non Jack, non tu ne peux pas être palestinien, réveille-toi, rien qu’apprendre l’arabe il te faudra des années et ton niveau d’anglais est pittoresque pour ne pas dire pitoyable, arrête de rêver. Le désir de fuite n’aura duré que quelques instants. Est-ce le manque de courage ou le fait que je me dois d’être utile dans mon pays qui m’empêche de faire cette folie, sûrement un peu des deux.
Auteur Jacques Galluccio.