Un rapport publié par Blossom Finance, une organisation de microfinance basée en Indonésie, affirme que le bitcoin est compatible avec la charia. A la suite de cette publication, le cours de cette cryptomonnaie a grimpé de 1.000 $ en quelques jours.
Par Soufiane Chahid
Le bitcoin reprend des couleurs. Après une chute vertigineuse, la cryptomonnaie a gagné près de 1,000 $ en quelques jours, pour se stabiliser à 8,075 $ (cours au 17 avril). A l’origine de ce regain de forme, un rapport publié par Blossom Finance, une organisation de microfinance basée en Indonésie.
Le document affirme clairement que “le bitcoin est permis en principe (par la charia, NDLR), car il est considéré comme reflétant le prix du marché dans les échanges internationaux et est accepté comme moyen de paiement auprès de beaucoup de commerçants“.
La question de savoir si le bitcoin est compatible ou non avec la charia continue à soulever beaucoup de débats au sein de la communauté musulmane. Dans la charia, la règle de base est la permissivité dans les transactions financières et commerciales.
Or en janvier dernier, le grand mufti d’Egypte, Shawki Allam, avait déclaré que cette monnaie était incompatible avec les règles de l’économie islamique. Cette fatwa vient d’être contredite par le mufti Muhammad Abu Bakar, responsable de la Sharia Compliance au sein de Blossom Finance.
Selon ce dernier, le bitcoin est considéré comme de la monnaie parce qu’il est considéré comme précieux par les gens, est accepté comme moyen d’échange par tous ou par un groupe important de personnes, représente une mesure de la valeur, et sert d’unité de compte.
La grande volatilité de cette cryptomonnaie ne peut être une raison suffisante pour la déclarer haram, souligne le rapport. “En fait, si ce principe était valide et appliqué, l’or, l’argent, les dollars américains et les euros seraient tous jugés non permis, puisque ces actifs connaissent également des niveaux extrêmes de spéculation“.
Que change la fatwa ?
Le Fonds monétaire international (FMI), la Banque mondiale et d’autres organismes financiers internationaux estiment que les avoirs des banques islamiques ont été multipliés par neuf à 1.800 milliards de dollars entre 2003 et 2013, soit une progression de 16% par an. Ils dépasseraient actuellement les 2.000 milliards.
Ce secteur va encore doubler de volume à 4.000 milliards de dollars en 2020, selon des experts. La halalisation du bitcoin pourrait ouvrir à cette monnaie un marché de 1,6 milliard de musulmans.
Badr Bellaj, consultant marocain en Blockchain (la technologie qui sert de base aux cryptomonnaies), estime que “pour l’Etat marocain, la question n’est pas de savoir si le bitcoin et charia compliant ou non. Le régulateur n’a pas interdit le bitcoin parce qu’il est haram ou halal, il l’a interdit parce qu’il représente un danger financier, car il est dans l’impossibilité de contrôler les flux“.
Cette Fatwa reste tout de même importante, car selon notre expert, “les finances islamiques doivent toujours se baser sur un avis légal. Par exemple au Bahrain ou dans le Golfe, il y a des banques qui font des opérations en bitcoin, mais dans un cadre réduit parce qu’il n’y avait pas un avis fiqhi ou charii qui l’autorise“.
Les banques islamiques s’adonneront-elles finalement au bitcoin? “Les banques avaient besoin d’une fatwa explicite sur le sujet, mais ce n’est pas suffisant. Il y a des éléments plus financiers que chariatiques qui empêchent son développement“, conclut Badr Bellaj.